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Regroupement de crédits : pas de devoir de mise en garde du banquier à l’égard de l’emprunteur

Le 28 avril 2020

Un crédit de restructuration permet le regroupement de plusieurs crédits en un seul. Cela permet d’enrayer une situation d’endettement en diminuant le montant des mensualités tout en augmentant la durée du prêt.

Dans un arrêt n°18-11.895 du 17 avril 2019, la Cour de cassation a eu l’occasion d’apporter des précisions sur le rôle du banquier dans le cadre d’un regroupement de crédits.

Selon cette jurisprudence, un regroupement de crédits qui « permet la reprise du passif et son rééchelonnement à des conditions moins onéreuses, sans aggraver la situation économique de l’emprunteur, ne crée pas de risque d’endettement nouveau ». Ce faisant, il ne donne pas lieu à un devoir de mise en garde du banquier à l’égard de l’emprunteur.

En l’espèce, un couple avait souscrit un prêt de restructuration. Cependant, ne parvenant plus à le rembourser, l’établissement de crédit les assignait en exécution de leur engagement. Il s’est alors vu condamner à verser des dommages-intérêts au couple en raison d’un manquement à son devoir de mise en garde.

Tout d’abord, qu’est-ce que le devoir de mise en garde ?

C’est le fait pour le banquier d’être tenu d’avertir l’emprunteur des risques qu’il est susceptible de prendre au regard de ses capacités financières de remboursement lorsqu’il souscrit un crédit, effectue une opération bancaire, etc.

En matière de crédit, ce n’est qu’en présence d’un crédit risqué au regard de la situation d’endettement de l’emprunteur que celui-ci doit être mis en garde par le banquier.  

Il en résulte que l’existence d’un devoir de mise de l’établissement de crédit dans le cadre de la souscription d’un crédit suppose un risque d'endettement excessif pour l’emprunteur.

Le crédit de restructuration a pour but de regrouper des crédits pour limiter l’endettement de l’emprunteur. De ce fait, le prêt est supposé réduire l’endettement et donc alléger la situation financière des emprunteurs.

Le regroupement de crédits n’est donc pas, par nature, supposé présenter un risque d’endettement supplémentaire pour l’emprunteur qui y a recours.

Cependant, la solution retenue par la Cour de cassation dans son arrêt est surprenante à plusieurs égards.

Alors que la jurisprudence favorise la protection du consommateur, cette décision s’inscrit dans un mouvement inverse. Elle est en faveur du crédit de restructuration et de l’établissement de crédit et non pas en faveur du consommateur, ici emprunteur.

Le devoir de mise en garde est normalement impératif entre un professionnel et un emprunteur « profane » ou « non averti ». Par « emprunteur profane », il faut entendre celui qui n’a pas de connaissance particulière en matière de crédit et au regard du type de crédit consenti.  Or, en ne reconnaissant pas de tel devoir dans le cas d’espèce, l’opposition traditionnelle profane/professionnel est remise en question. Ici, peu importe que le consommateur soit profane, le devoir de mise en garde n’est pas nécessaire. Il semble donc que la décision instaure un déséquilibre entre banquier et emprunteur.

En revanche, cette décision est favorable aux établissements de crédit qui revendiquent depuis quelques années une surcharge d’obligations excessive.

Pour autant, à l’aune de la crise du coronavirus, la solution apportée par cet arrêt suscite des inquiétudes. Il se peut que les personnes possédant plusieurs crédits ne parviennent pas à l’avenir à rembourser leurs mensualités.  Il est alors possible qu’on leur propose un crédit de restructuration. Cependant, en l’absence de mise en garde obligatoire par l’établissement de crédit, l’opération peut s’avérer risquée pour l’emprunteur.

Si vous éprouvez actuellement des difficultés à rembourser vos crédits ou craignez être en situation de surendettement, notre cabinet est en mesure de vous conseiller et de vous accompagner dans vos démarches.

Si vous avez des questions, n’hésitez pas à nous contacter ou à consulter notre page dédiée au droit de la consommation.